Hollande aux Français : « Je ne change rien ! »

    J’ai écrit le soir même du scrutin européen que le résultat ne changerait rien, ni pour l’Europe, ni pour la France. Le premier a avoir abondé dans ce sens est le Président de la République lui-même. Il est venu lundi soir, dans une courte allocution, confirmer le cap. Qu’a-t-il dit ?

Pourquoi Hollande répond par plus d’Europe et ne change rien à sa politique…

images                                                                                        François Hollande à la France au bord du gouffre : « Droit devant ! »

    « L’avenir de la France, il est dans l’Europe ». Je passe sur le redoublement de sujet, un américanisme habituel dans la bouche de quelqu’un qui a fait partie de la promotion 96 des young leaders de la French American Foundation (lire)1, et qui a dû faire bondir Alain Finkielkraut et tous les amoureux de la langue française.  Il faut que les Français s’y habituent : dans l’esprit de nos élites cosmopolitistes2, la France n’est déjà plus une nation mais une région composante, on pourrait presque dire une banlieue, de l’Europe. Cela signifie qu’ils se satisfont parfaitement d’une France moins prospère dans une Europe qui va mieux. De ce point de vue, le scrutin de dimanche ne change strictement rien. Tout juste a-t-il fait quelques concessions de pure forme, avec deux fautes de Français en deux phrases, bravo !  (Lire le verbatim de l’allocution présidentielle« L’Europe, elle est devenue illisible, j’en suis conscient, lointaine et pour tout dire incompréhensible, même pour les États. Cela ne peut plus durer. L’Europe, elle doit être simple, claire, pour être efficace là où elle est attendue, et se retirer là où elle n’est pas nécessaire. » 

    Sur le message envoyé par les Français aux politiques (« et aux médias », a dit Raffarin qui, dès mardi soir, faisait campagne pour la présidence du Sénat), François Hollande a été parfait. C’est d’ailleurs à ça qu’on reconnaît les Socialistes : très forts sur le diagnostic, nuls sur les remèdes. Ce vote, a-t-il dit« c’est une défiance à l’égard des partis de gouvernement, de la majorité, comme de l’opposition. Ce vote, c’est une défiance à l’égard de la politique qui, après tant d’années de crise, appelle toujours des efforts sans que l’on voie encore les résultats. » Une réalité qui « traduit une peur du déclin de la France, de la mondialisation et ce sentiment exprimé tant de fois, d’abandon face à la dureté de la vie. » On ne peut mieux se faire le porte-parole des préoccupations des Français.

Le temps travaille pour Hollande.

    Le problème pour les Français est que, tout Président de la République qu’il est, François Hollande n’est que François Hollande, l’homme d’un système que j’ai souvent décrit ici et dont j’ai disséqué l’idéologie, les buts et les pratiques dans mon livre La France Confisquée. Cet homme, comme tous les hommes de ce système, n’est pas insensible à l’état du pays et à la désespérance du peuple français mais il est sûr de son fait, de ses opinions, de son idéologie, encore une fois, de ses engagements et de ses solutions. Il est de ces gens perclus de certitudes et droits dans leurs bottes qui nient les réalités et ont la prétention d’imposer leurs lubies. Encore Hollande est-il l’un des moins dogmatiques et déconnectés d’entre eux ; la réaction des députés socialistes à son discours de lundi a été, de ce point de vue, hallucinante. Alors que leur parti a fait 14% et que le Front de Gauche a tout juste dépassé 6%, eux réclament une politique encore plus à gauche.

    C’est pourquoi, après avoir décliné les bonnes raisons des Français d’être mécontents, après avoir dit, en mentant effrontément (quand il prétend avoir baissé les impôts) comment sa politique allait améliorer leur sort, François Hollande a annoncé clairement qu’il n’en changerait pas. Comment s’en étonner ? Je viens de dire en quoi le vote de dimanche n’est qu’une péripétie dans le cours de l’Histoire qui mène la France à sa dissolution dans un ensemble européen intégré. Mais c’est également une péripétie au plan politique interne. Si Hollande et sa majorité en avaient une autre qu’ils jugeraient plus propre à améliorer l’état de la France, comment douter qu’ils l’appliqueraient ? Evidemment, nous, les Patriotes, pensons qu’il y a une politique alternative qui met le Peuple français au cœur de ses préoccupations mais c’est justement parce que nous sommes des Patriotes et que nous avons en tête l’intérêt de notre pays que nous le pensons. Hollande et les Socialistes, mais pas seulement eux, l’UMP et le Centre aussi, ne peuvent pas penser comme nous puisqu’ils sont tous adeptes d’une idéologie qui nie aux Nations et aux Peuples leur place centrale dans l’ordre universel. L’UMPS et ses satellites ne peuvent pas même concevoir ces solutions car elles n’entrent pas dans leurs catégories mentales.

François Hollande : « Quand je me regarde, je me désole, quand je me compare, je me console ! »

    Peut-on les obliger à intégrer ces considérations dans leur « logiciel », comme on dit aujourd’hui ? Non ! Ils sont à l’abri derrière des institutions forgées en quarante années d’ajustements destinés à verrouiller, étanchéifier un  système qui leur garantit l’alternance et le partage du pouvoir. C’est ainsi qu’on peut toujours demander au Président de la République de dissoudre l’Assemblée nationale : rien ne l’oblige à le faire. Il ne le fait pas parce qu’il n’y est pas obligé – et c’est heureux car, si chaque élection perdue est prétexte à dissolution, c’est le principe républicain lui-même qui est remis en cause. Et il ne le fait pas parce que tirer des conclusions définitives d’une péripétie électorale serait une faute politique car le temps travaille pour lui. Qu’on le veuille ou non, François Hollande et les Socialistes ont encore trois ans pour se refaire et pour aborder la seule élection qui compte avec les meilleures chances de l’emporter.

    Là, la politique politicienne, la « cuisine », comme disent les faux démocrates (car la stratégie politique, les manœuvres, les manigances, même, si on veut, ont leur grandeur… et aussi leurs servitudes), entre en lice. Alors, cette cuisine, quels en sont les ingrédients ? Le premier est la confirmation de la très grande probabilité de voir Marine Le Pen au deuxième tour de la Présidentielle de 2017. Cette donnée a, pour ses adversaires du premier tour, une conséquence directe : pour être élu Président de la République, il faut et, dans l’état actuel d’incapacité de MLP à réunir une majorité de Français sur son nom, il suffit d’être au second. On ne peut s’empêcher de penser que, pour François Hollande, cela présente beaucoup plus d’avantages que d’inconvénients. Parce que, deuxième ingrédient, non seulement le concurrent prétendument « de droite », l’UMP, n’est pas en meilleure forme que le PS mais tout tend à faire croire que, dans les trois ans à venir, son état va empirer du fait de la guerre interne qui s’annonce entre les prétendants à la candidature. En quelque sorte, Hollande se dit : « Quand je me regarde, je me désole, quand je me compare, je me console ! ».

    Dans ces conditions, pourquoi voudriez-vous qu’il s’affole ?


1 J’en ai compté onze dans un discours de cinq minutes.

2 J’utilise souvent le néologisme cosmopolitiste pour désigner les théoriciens de la fin des nations et du gouvernement mondial ou, formulation plus présentable, de la cité universelle.

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