Oui ! Albert Camus est bien un philosophe et homme de théâtre Pied-Noir, n’en déplaise aux idéologues en chambre de l’anti-colonialisme rétrospectif qui veulent en faire un Algérien, voire, pour certains révisionnistes et faussaires de l’Histoire au service du FLN, un porteur de valises en puissance. Voilà, c’est dit ! C’est mon opinion et je la partage.
Je ne reviendrai pas sur les débats proprement dits, sinon pour remarquer qu’ils sont très vite allés au-delà du thème de la violence politique, ce qui était, compte tenu de la riche personnalité de Camus, naturel et heureux. Les deux journées ayant été entièrement filmées par une équipe de télévision disposant de trois caméras, un DVD sera très prochainement mis à la disposition du public. Par ailleurs, le verbatim des interventions sera publié. Il me suffit de dire que, ce weekend, les trois cents personnes qui ont fait le déplacement de Masseube samedi et les cent-cinquante qui y furent dimanche ont vécu un colloque de très haute tenue intellectuelle et morale. L’assistance, parfaitement au niveau des intervenants, en a d’autant plus profité que les interventions ont été émaillées de traits d’humour, un registre dans lequel M. Jean-Pierre Brun s’est particulièrement distingué.
Mais l’invitée d’honneur de ce colloque était l’émotion. Dès vendredi soir, elle s’était emparée des cœurs de la cinquantaine de personnes qui avaient réservé pour le weekend. Samedi et, surtout, dimanche matin, dont l’essentiel était consacré au 5 juillet 62, les témoignages poignants des rescapés d’Oran ont mis en évidence la préméditation des terribles massacres commis ce jour-là. Tirs à la mitrailleuse 12.7 dès 9 heures du matin, contre les façades des maisons et sur les passants, poursuite des fuyards par des gens armés de couteaux et d’armes de poing jusqu’au fond des placards d’appartements, viols et assassinat d’enfants et de femmes sans défense, tuerie à la crosse de fusils, enlèvements dans des camions amenés là pour ça puis exécutions sommaires au couteau et au fusil à l’écart de la ville, rien n’a été épargné à des Européens d’Oran sidérés par la peur et la surprise. Le tout, par ordre d’un général Katz criminel, sans que l’Armée française appelée au secours ne daigne sortir de ses casernes.
Dans l’assistance, il y avait quelques dizaines de nos compatriotes patos. Tous sortirent de cette expérience bouleversés. C’est très réconfortant pour les PNH (Pieds-Noirs et Harkis) jusqu’à présent convaincus de l’indifférence des Français à leur drame. S’il fallait tirer une leçon de ce colloque, c’est celle-ci : les PNH ne sont pas seuls. Et, s’ils prennent la peine de l’informer eux-mêmes sans attendre que des médias hostiles le fassent pour eux, la France entière prendra partie pour eux.