Européennes 2014 : le FN, comme prévu !

Et maintenant, qu’est-ce que ça change ?

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    Ce qui fonctionne pour la France va pour l’Europe. Il y a trop longtemps que le mécanisme est en place, il est trop bien huilé, pour s’enrayer. Quoi que les électeurs aient dit, les Européistes représentent, bon an, mal an, au moins cinq cents des sept-cent-cinquante députés du nouveau parlement. Et, comme ils s’entendent parfaitement sur le projet européen et que, finalement, ils ne se disputent que sur les détails et pour la galerie, ils trouveront toujours matière à s’arranger pour arriver à leurs fins communes. D’ailleurs, le Parlement européen n’a aucun pouvoir, celui-ci étant toujours exercé en dernier ressort par le Conseil européen qui réunit les chefs d’État ou chefs de gouvernement des vingt-huit états membres. Un Conseil où les chefs des états les plus importants disposent en réalité d’un véritable véto.    

Un élection qui ne change rien à l’Europe…

    Certes, le scrutin de ce dimanche 25 mai a permis une percée des opposants mais leur opposition respective est de nature différente. Ceux qui se proclament « de gauche » ne sont pas opposés à l’Europe supranationale mais à sa politique jugée antisociale, ce qu’illustre l’intitulé du parti du Grec Alexis Tsipras, Gauche européenne. Ceux-là trouveront toujours à s’arranger avec les Eurocrates au pouvoir. Classés à l’extrême-droite, ou, comme on dit quelquefois avec des pudeurs de chaisière, « à la droite de la droite », les souverainistes, eux, risquent, de toute façon, d’être empêchés de créer ensemble un groupe parlementaire qui leur permettrait de faire entendre leur voix. La raison est qu’il faut vingt-cinq députés de sept pays différents pour constituer un groupe. Mais l’écueil semble en passe d’être évité, tant les résultats leur sont favorables. Pour autant, le fait d’obtenir, grâce à la création d’un groupe parlementaire, des moyens de fonctionner et de se faire entendre ne change rien à l’affaire. Il n’y a pas d’opposition susceptible de ralentir de l’intérieur la marche de l’Europe à l’intégration.

    Total : une élection pour rien ? Evidemment non, ne serait-ce que pour les élus eux-mêmes et pour leurs partis respectifs. Mais une élection pleine d’enseignements… pour la politique intérieure de chacun des pays de l’UE. Naturellement, je ne me hasarderais pas à tirer des leçons pour les autres pays. Encore que, s’agissant de l’Allemagne, où on ne serait même plus étonné si Angela Merkel était sacrée Kaiserin avec la bénédiction des sociaux-démocrates allemands, le verdict est éloquent. La Chancelière est plus que jamais la patronne de l’Europe. Des enseignements pour le Royaume Uni également, où les électeurs ont, pour la première fois depuis plus d’un siècle, désavoué dans un scrutin national les deux partis dominants du royaume qui, à leurs yeux, ne vont pas assez vite dans le rejet de l’UE.

…mais qui pimentera la cuisine politique française.

    Comme de juste, c’est en France que le résultat des Européennes aura les conséquences les plus spectaculaires. Pas sur le fond, d’ailleurs, car, là plus encore que dans l’UE, les institutions garantissent l’avenir des deux camps qui alternent et se relaient au pouvoir depuis 1974. Avant d’examiner ces conséquences, un mot sur les résultats. Comme toujours, les listes FN ont fait mieux que ne leur donnaient les sondages. Quatre points d’écart, excusez du peu ! Comme de juste, la déroute socialiste a été pire que celle annoncée par les mêmes sondages : 14% de voix au lieu de 16% annoncés. Enfin, comme d’hab, les Verts, mais surtout Mélenchon et ses amis, ont été très en dessous des prévisions, surtout ces derniers. Bref ! La tendance habituelle des sondeurs à minimiser les uns et à surestimer les autres, dûment relayés par des médias aux ordres, a été respectée. Les commentateurs se sont bien gardés, en tout cas jusqu’à présent, de relever que, dans un scrutin où la participation a été supérieure de quatre points en moyenne à celle de 2009, les listes FN ont fait, dans les circonscriptions où il était déjà bien implanté, beaucoup mieux non seulement en pourcentage (x 2,5) mais aussi en voix (x 3,15). Cela confirme que les Français sont de plus en plus nombreux à basculer de l’abstention au vote FN. Il est difficile de dire si c’est un vote de conviction ou d’adhésion mais c’est à coup sûr une évolution notable.

    Ce vote annonce-t-il des jours radieux pour le FN ? Si son projet est d’occuper des postes, d’obtenir des moyens pour lui-même et d’assurer une carrière politique à ses cadres, oui ! Si son but est d’empêcher la décadence de la France, non ! En tout cas, s’il persiste à vouloir aller seul à la conquête du pouvoir. Un très haut cadre du FN m’a dit en 2009 que son parti se donnait quinze ans pour y parvenir. Je luis avais rétorqué qu’en 2024, la France ne serait plus. J’ai déjà eu l’occasion d’expliquer dans ce blog que cette stratégie réduisait le FN à un rôle de fossoyeur, ce que des lecteurs m’ont reproché, comprenant que leur parti préféré serait celui qui tuerait la France. Je voulais simplement dire qu’à trop prendre son temps, le FN arriverait au pouvoir pour présider aux funérailles d’une France assassinée par les cosmopolitistes. Quoi qu’il en soit le même interlocuteur autorisé et très bien informé a admis il y a tout juste un an que j’avais sans doute raison. Depuis, ma position a évolué ; je ne crois même plus que le FN seul puisse gagner à long terme. Ce, pour trois raisons : la première est que le système, qui secrète ses anticorps, est formidablement organisé pour se pérenniser ; la deuxième est que le processus de liquidation de la nation française et de sa civilisation est dans sa dernière phase et que l’échéance n’est pas 2024 mais 2017 ; la troisième est que, après cette date, les Français, même les fidèles du FN, finiront pas se lasser d’attendre après un parti qui leur promet depuis quarante-deux ans des jours meilleurs et leur demande de patienter encore un peu alors que le tiers d’entre eux est à l’agonie.

2017 : sauver la France !

    On a longtemps cru que le scrutin majoritaire à deux tours était différent, dans ses conséquences, du scrutin proportionnel. C’est vrai dans ses implications quant à l’exercice du pouvoir mais ça l’est beaucoup moins quant à sa conquête. Dans les deux cas, il faut être capable de faire des alliances, la seule différence étant que celles-ci s’opèrent avant les élections dans le cas du scrutin majoritaire tandis qu’elles le sont après, au coup par coup et de manière opportuniste, en cas de scrutin proportionnel. Evidemment, le système en vigueur n’empêche pas les « sensibilités » des camps en présence d’avoir chacune son candidat de premier tour ; mais il s’agit en réalité d’une primaire interne. Les électeurs savent bien à l’avance avec qui, s’il sont élus, ils gouverneront. Le problème est que, en pratique, le FN ne peut gouverner avec personne, mais on a vu que tel n’est pas son désir. Cela poserait moins de problèmes s’il était capable de rallier à lui une majorité de mécontents du système mais ce n’est pas le cas : la preuve est que, ce dimanche, dans les trois régions où les listes FN ont fait leurs meilleurs scores, cinq fois plus de Français ont préféré s’abstenir que de voter pour elles (11 299 103 contre 2 365 143).

    Ceci étant, le résultat de ce dimanche aura des conséquences, non pour l’avenir de la France (sauf si le FN renonce à sa stratégie) mais pour la cuisine politique nationale. La première est que tout le monde s’attend à l’implosion de l’UMP. Dimanche soir, tandis qu’Alain Juppé faisait des avances à l’UDI-MODEM, François Fillon semblait vouloir transformer son groupuscule Force républicaine en véritable parti, et Nicolas Dupont-Aignan appelait les Gaullistes souverainistes à se rallier à son panache blanc. Quant à Nicolas Sarkozy, j’ai toujours cru que seul le trésor de guerre amassé en cinq ans de présidence de la république motivait ses « amis ». Sa tribune d’avant scrutin, complètement à côté de la plaque et programmée pour tirer la couverture à lui, sera portée à son débit par des médias toujours adeptes du lécher, lâcher, lyncher. De toute façon, je ne crois pas que les Français l’aient jeté en 2012 pour le reprendre en 2017.

    De leur côté, les Socialistes vont leur bonhomme de chemin sans paraître s’inquiéter outre mesure : ils en ont vu d’autres. et la route est longue. Surtout, ils savent que le FN à 25%, c’est pain bénit pour eux. D’abord, c’est la meilleure façon de retenir le Front de Gauche et les Verts de jouer les chèvres de M. Seguin ; ensuite, ils voient très bien leur candidat de 2017 gagner face à Marine Le Pen.

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