Vladimir Poutine, l’homme à abattre (retour sur).

    Mon article Vladimir Poutine, l’homme à abattre (lire ou relire) a suscité quelques réactions dont celles de M. le Dr Barisain-Monrose, auxquelles il m’a semblé utile de répondre.  Je l’ai d’abord fait à la suite de son premier commentaire mais je pense utile de le mettre plus en vue car il me permet de préciser ma pensée à l’intention de ceux que ça intéresse.

Pour une alliance raisonnée avec la Russie.

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    Je ne me réfère pas à Maurras mais à Barrès et Péguy ; ensemble, ils avaient développé l’idée d’un « patriotisme mystique » qui me paraît tout à fait conforme à celui des Russes et auquel j’adhère pleinement. Aimer sa patrie comme on aime sa mère, je crois que c’était, jusqu’à ces dernières années, la définition même du patriotisme. On parlait alors de « mère patrie ». Les Russes ne sont pas différents de nous. D’ailleurs, si vous suivez l’actualité ukrainienne, vous constatez que de très nombreuses personnalités européennes en ont exactement la même analyse que Poutine. Quand les intérêts nationaux sont en jeu, tous les patriotes ont la même logique.

    D’ailleurs, il ne s’agit pas de « s’accrocher à ses basques », ni même de passer avec lui une alliance exclusive. Les temps ne sont plus aux coalitions d’affrontement mais aux alliances objectives. Poutine est évidemment un patriote russe et c’est tout naturel. On aimerait que nos Hollande et nos Sarkozy soient autant que lui soucieux de l’avenir de leur pays. C’est parce qu’il est patriote qu’il peut comprendre d’autres patriotes. C’est en cela qu’il constitue un leader naturel pour les Européens qui refusent de voir leurs pays respectifs dissous dans un ensemble sans âme où l’argent – américain – serait roi.

    D’ailleurs, une alliance raisonnée avec la Russie, avec laquelle la France partage une très longue histoire, présenterait beaucoup moins de danger qu’une sujétion aux Etats-Unis (car le TAFTA, c’est ça !). Je rappelle que la France est, même mal en point, beaucoup plus puissante que la Russie sur le plan économique (2 900 mds$ de PIB contre 2 057 mds$ ; en parité de pouvoir d’achat par habitant, le rapport est de 34 000 $ contre 15 000 $). Sur le plan militaire, la France n’a rien à craindre de la Russie alors que « l’atlantisation » de l’Europe comporte un volet militaire, neutre pour tous les pays de l’UE mais pas pour le nôtre. C’est le renoncement à des forces armées dignes de ce nom. Avez-vous remarqué que notre armée supporte à elle seule près de la moitié de nos économies budgétaires ?

    Cher M. Monrose, je reconnais bien là votre goût du débat et de la rhétorique. Préter à son interlocuteur des pensées qu’il n’a pas est le b, a, ba du sophisme. Je n’ai jamais dit, par exemple, qu’il fallait « jeter le bébé avec l’eau du bain (atlantiste) ». J’ai une très grande admiration pour les Américains et je sais qu’eux-mêmes ne sont pas unanimes derrières les Epiméthée qui prétendent imposer leurs lubies aux Européens. Ce n’est pas les insulter que de résister à un projet qu’ils n’appliquent pas chez eux, d’ailleurs, puisque le moindre état de l’union campe farouchement sur ses prérogatives et ses lois, fussent-elles parfaitement contraires aux droits-de-l’homme qu’ils professent pour les autres (cf. la peine de mort, légale dans 32 états sur 51). Mieux, plus les Européens résisteront, y compris en s’alliant au « dictateur » Poutine, plus les Américains amoureux de l’Histoire et de la Civilisation seront encouragés à résister avec eux. En 2003, le discours de Villepin à l’ONU n’a pas empêché l’invasion de l’Irak mais il a soulevé l’enthousiasme partout dans le monde, y compris en Grande-Bretagne et aux États-Unis.

    Ceci étant, les Nations n’ont pas d’amis mais des alliés. Il n’y a aucune raison pour que, balayant l’Histoire, la France ne se souvienne que des bienfaits de l’Amérique. Une Amérique qui existe parce que la France l’a bien voulu, je le rappelle. Une Amérique qui a envoyé en 1917 deux millions d’hommes, certes, mais que la France a habillés, nourris et armés. Une Amérique qui doit sa prospérité au fait que les Européens se sont entr’égorgés et qui, à chacune de ses interventions, a semé en Europe les germes de la guerre suivante : en 1920, avec un traité de paix bancal (qu’elle n’a jamais signé, d’ailleurs) assorti d’un dépeçage de l’Europe annonciateur de la la deuxième guerre mondiale ; en 1945, en laissant Staline s’emparer de la moitié de l’Europe. Etc

    Les Américains ont toujours été des alliés pas toujours francs de la France. A chaque fois qu’ils ont débarqué sur le territoire national pour, soi-disant, le « libérer », ils s’y sont comportés comme en terrain conquis (en Syrie, au Liban, en Algérie et en France occupée). Nous, les natifs d’Algérie, savons parfaitement, par exemple, qu’ils ont encouragé les mouvements indépendantistes, y compris le FLN auquel ils ont permis d’obtenir un siège d’observateur à l’ONU. Et ce ne fut jamais sans arrière-pensées. Depuis lors, la France a vécu libre grâce à sa force de dissuasion et à sa puissance économique retrouvée et non « sous la technologie américaine et les Pershing ».

    A propos de « dictature », que vous appliquez sans discernement, à la suite des propagandistes européistes, à un Vladimir Poutine élu par son peuple, que pensez-vous des pouvoirs exorbitants de notre Flamby Hollande ? Ailleurs, vous écrivez que Bush et Clinton ont commis des « erreurs ». Quel euphémisme ! Je ne sais pas pour Clinton mais une chose est sûre, ce ne sont pas des erreurs que Bush a commises mais des crimes. Ce, pour des raisons qui n’ont pas grand-chose à voir avec la grandeur de son pays mais beaucoup avec les intérêts de ses amis affairistes et ceux d’Israël, évidemment.

    Enfin, la ploutocratie n’est pas une fatalité. De nombreux états européens sont gouvernés avec un minimum de sens moral qui limite les dérives. Elle n’est pas non plus l’apanage de la démocratie. Le second empire, qui fut, n’en déplaise aux fossoyeurs de l’Histoire, une grande période pour notre pays, fut aussi le règne de la ploutocratie. Ce qui n’est pas une raison pour les peuples de se laisser dépouiller, ni dicter leur vie et leurs pensées.

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