Pendant ce temps, la corruption institutionnalisée (3/4)

Les médias aussi « en » croquent.

 Colombani_Plenel_Minc                                                                                                      Jean-Marie Colombani avec ses anciens complices Alain Minc et Edwy Plenel. 

    Tout le monde connaît Christophe Barbier, Jean-François Kahn, Catherine Nay, Franz-Olivier Giesbert  Jean-Marie Colombani, Laurent Joffrin, Yves Thréard, Eric Zemmour, Nicolas Domenach ; un peu moins Raphaëlle Bacqué, Renaud Dély, Guillaume Roquette, Alexis Brézet, Hélène Pilichowski, Anne Fulda, Joseph-Macé Scaron, mais on les voit de plus en plus, surtout, parité aidant, les femmes. Directeurs de journaux ou de magazines, l’Express, l’Obs, le Point, Libération, le Monde, le Figaro, tous ont en commun de travailler à la fois dans la presse écrite et, à des degrés divers, pour les médias audio-visuels.  

    Tous, excepté Eric Zemmour, ont comme plus petit dénominateur commun de ne pas contester la trajectoire antinationale imprimée depuis trente ans à notre pays. Une trajectoire qui mène à l’assujettissement de la France, via l’Europe, à l’Amérique. Sur le plan institutionnel : marche forcée vers l’Europe supranationale ; en économie, fusion intégrale de l’économie européenne dans un vaste périmètre atlantique ; en matière stratégique, transfert de sa défense à l’OTAN, c’est-à-dire aux États-Unis ; sur le plan éthique : renoncement à ses propres normes ; au plan des mœurs, abolition du modèle hérité de la civilisation gréco-romaine chrétienne et adoption sans restriction des lubies individualistes américaines. Certes, tous ne sont pas comme des poissons dans l’eau dans le modèle de société que la pensée dominante veut imposer aux Français, mais aucun n’en est assez éloigné pour s’y opposer.

    Le système se satisfait parfaitement d’une contestions interne aux marges. Il l’organise, même, comme les multinationales organisent leur propre concurrence. C’est ainsi que des gens apparemment très critiques comme Yves Thréard, Alexis Brézet, Guillaume Roquette, tous du Figaro, tiennent un discours très critique dans les termes, notamment sur l’Europe, mais, comme l’UMP à propos du mariage gay, ils n’ont nullement l’intention de revenir dessus. Critiquer certaines modalités du système, oui, LE système, non ! Et, de toute façon, si la tentation leur en venait, ils en pèseraient très vite les conséquences qui sont de ne plus « en être ». Un seul s’y est risqué, et encore, compte tenu de sa trajectoire, je ne suis pas sûr qu’il l’ait fait sciemment : Eric Zemmour.[1] On voit ce qu’il prend ! Car le système, comme la mafia, ne pardonne rien moins que l’abandon du clan.

    Certains d’entre eux sont sollicités par la télévision, et c’est normal, pour donner des avis ponctuels ; d’autres se font connaître grâce à des émissions plus ou moins people comme On n’est pas couché (Eric Zemmour, Natacha Polony, Léa Salamé) ou Le grand journal sur Canal + (Natacha Polony, Jean-Michel Apathie) d’autres ont leur rond de serviette dans des émissions de débat comme C dans l’air elle-même présentée par un cumulard télé-radio : Yves Calvi ; d’autres encore n’y sont conviés que sur des thèmes particuliers : économie, faits de société. D’autres, enfin, sont particulièrement choyés par le service dit « public » de radio-télévision. Deux d’entre eux s’y sont même taillé de véritables fiefs dans des conditions à la limite de la légalité : ce sont Franz-Olivier Gisbert et Jean-Marie Colombani.

images                                                                                       Chouchou du service « public » de télévision, FOG donne la leçon aux Français.

    Ces ceux-là sont des caricatures du système de confiscation du bien public. Mais si l’un, Franz-Olivier Giesbert, quoique convaincu et parfaitement en phase avec la doxa dominante, agit par boulimie d’honneurs et d’argent, l’autre, Jean-Marie Colombani est le prototype de l’idéologue antinational et mondialiste torturé. Ancien du programme Young leaders de la French American Foundation, Colombani est de tous les coups portés à la France. Celui qui s’est jadis proclamé d’abord corse puis européen et, ensuite seulement, français, travaille depuis toujours à l’annexion de l’Europe par l’Amérique. Directeur du Monde (à 22 500 € par mois en 2000), il avait, dans un article de deux pages, théorisé l’Europe des régions transnationales. Evincé du Monde avec 950 000 € en guise d’indemnités de départ en 2007, il a fondé avec Jacques Attali et son complice Eric Le Boucher, le patron de la rédaction du magazine économique Enjeux-Les Echos et membre du très officiel Centre d’études prospectives et d’informations internationales, le site slate.fr. Ce site a touché 200 000 € de subventions en 2011 (lire). Mais, pour que le message européiste porte bien, il a longtemps animé une émission, la Rumeur du monde sur France Culture avec son compatriote corse Jean-Claude Casanova, jusqu’à ce que celui-ci disparaisse du paysage audiovisuel à la suite du scandale de Sciences Po.[2]

    Colombani, lui, passait aussitôt sur France Inter où, depuis, il anime l’émission Questions critiques avec Caroline Fourrest et Dominique Reynié où un européisme sans nuances et sans contestation possible est vanté sur un ton péremptoire de maître Colombani. Pour avoir souvent écouté cette émission (le vendredi à 18h25), je puis témoigner qu’en matière de questions, j’y ai surtout entendu des réponses de maître Colombani et des positions intransigeantes de la très féministe Fourrest. Quant aux critiques, j’ai assisté un soir à une prise de bec inouïe entre Colombani et Dominique Reynié. Mais, comme ça ne suffit pas à son appétit pantagruélique, Colombani dispose aussi d’une émission sur Public Sénat dont le titre est, en toute modestie Jean-Marie Colombani invite. C’est dire si, comme ses semblables, il se sent chez lui sur le service dit « public » de radio-télévision.

    Parallèlement à cette intrusion de gens de la presse écrite dans les médias publics, de fait, le service public de radio-télévision, comme les autres, est de plus en plus confisqué par des intérêts privés. Il fut un temps où, pour avoir une télé, il fallait, comme Bouygues en 1987, débourser 3 mds€ de l’époque (l’équivalent de 740 m€ 2014) pour avoir TF1. Depuis deux ou trois ans, il se passe quelque chose de formidable dans le service public de télé : il est dévolu sans bourse délier à un groupe privé qui est le Groupe Lagardère. Non seulement la branche médias de la société d’Arnaud Lagardère ne paie rien à l’État pour avoir le droit de diffuser ses programmes mais, de plus, elle lui vend ses programmes. En effet, à côté de dix chaînes spécialisées ou confidentielles dont MCM, Gulli, Canal J, Mezzo, RFM TV, sa filiale médias Lagardère Activa a vingt-neuf sociétés de production filiales. Parmi elles, Maximal Productions qui produit des documentaires et toutes les émissions commençant par « C » comme C dans l’air, C politique, C à dire, C à suivre sur France 5. Elle produit aussi @la carte sur France 3 et Les arts de vivre sur France 24.

Elkabbach_le_parrain                                                                                   Elkabbach avait donné 100 millions de Francs à Delarue pour créer Réservoir Prod ; à sa mort, il l’a rachetée pour Lagardère Médias.

    Réservoir Prod, que Lagardère a acquise à la mort de son fondateur Jean-Luc Delarue, produit Toute une histoire, présentée par Sophie Davant sur France 2. Carson Prod produit  notamment Les chansons d’abord sur France 3. Etc. Et alors, me direz-vous ? Et alors, de l’aveu même des  sociétés de production concurrentes qui ont déjà fort à faire avec la concurrence déloyale des sociétés de production fondées par d’anciens salariés des chaînes publiques, les productions Lagardère sont favorisées. Et pour cause : le patron d’Europe1, fleuron du groupe, Jean-Pierre Elkabbach lui-même, est animateur-producteur de Bibliothèque Médicis sur Public Sénat. Coup de chance, Elkabbach, a été président de France Télévisions. C’est lui qui a, de 1993 à 1996, financé avec l’argent de la redevance (les fameuses « patates »), la création des sociétés de Delarue, d’Arthur, de Nagui. Redevenu patron d’Europe 1 en 1996, il en a cumulé la présidence avec celle de …Public Sénat jusqu’à 2009. No comment !

    Comment voulez-vous qu’avec des médias subventionnés chaque année à hauteur de 2,5 mds€ (deux milliards et demi d’€uros !) et une profession aux intérêts aussi  imbriqués avec ceux du politique, celui-ci n’ait pas les coudées franches pour se gaver d’argent public ?

(Après-demain, fondations et think tanks, les « faiseurs d’opinion » subventionnés).

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[1] Eric Zemmour est surtout ostracisé parce qu’il « trahit » un clan dont il a fait partie. D’ailleurs, s’il n’avait pas été peu ou prou gauchiste dans sa jeunesse puis gaulliste chevénementiste plus tardivement, il n’aurait jamais fait carrière dans la presse ou à la télé.

[2] Lire le rapport de la Cour des Comptes.

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