Big Brother is watching you !

Disparition des taxis : vers l’Europe comme 51ème état de l’Union ?

UBER

    Devinette : quelle application est jugée suffisamment nocive pour être interdite en Allemagne, en Belgique, aux Pays-Bas, en Espagne, en Inde, en Thaïlande, mais autorisée en France ? Un indice : c’est un logiciel qui permet à des particuliers de prendre des taxis qui ne sont pas des taxis puisqu’ils sont conduits par des particuliers qui gagnent de l’argent sans payer ni charges sociales, ni taxes, ni impôts. Vous ne trouvez pas ? Autre indice : cette application appartient à une start-up américaine qui échappe totalement, dans les pays où elle est exploitée, au paiement de charges sociale, de taxes et d’impôts. Je m’amuse mais tout le monde a compris qu’il s’agissait d’UberPop, cette application qu’il suffit d’installer sur son mobile pour pouvoir à tout moment commander pour pas cher une voiture avec chauffeur sans être obligé de passer par un taxi. Et tout le monde a compris que, si j’en parle, c’est qu’il y a là derrière ce que Martine Aubry appellerait un « loup », autrement dit pour ceux qui ne seraient pas ch’tis, une embrouille.

    De fait, UberPop est la nième manifestation de ce qui constitue, avec Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft (les Gafam), notamment, le début de la mise en œuvre du projet de nos élites : arrimer l’économie française à l’américaine. Compte tenu de toutes les autres initiatives prises dans tous les domaines et, avec la perspective de la signature d’un traité transatlantique qui ouvrirait l’Europe aux produits agricoles et industriels américains, c’est à la création d’un véritable 51ème état de l’union qu’on assiste. En effet, quand, dans un pays, les multinationales américaines ne paient pas d’impôts, si non seulement les normes tarifaires mais aussi toutes les autres normes, éthiques, sociales, morales, tombent, si ledit pays se déleste de cette fonction régalienne qu’est le droit d’administrer la justice en matière commerciale et la transfère à des intérêts privés (arbitrage), si, enfin, il substitue une idéologie individualiste importée des États-Unis à un mode de relation sociale hérité d’une civilisation bimillénaire, alors ce pays, de fait, se nie lui-même et devient un satellite des États-Unis. Or, l’interdiction d’UberPop indique que, dans toute l’Europe, les gouvernements résistent à cette hégémonie américaine. Toute l’Europe sauf la France.[1] Et, même si le gouvernement français décidait finalement de l’interdire définitivement, ce ne serait que reculer pour mieux sauter car le traité transatlantique de libre-échange le validera d’office.

    Si le gouvernement recule sur UberPop, c’est pour deux raisons : la première est qu’il lui est difficile de se distinguer des autres pays d’Europe. La seconde est que la tendance en cours est au profil bas, en France mais aussi à l’UE. On a vu Mario Draghi ouvrir les vannes du crédit, sans succès, d’ailleurs, puisque les banques, qui se gavent en rackettant leurs clientèle de particuliers à coups de frais exorbitants, boudent l’offre de la BCE à 0,5% d’intérêt. Et on voit le nouveau président de la Commission, Jean-Claude Juncker, multiplier les démonstrations de bonne volonté à l’égard des états en difficulté. Les peuples qui grondent ont fini par convaincre ces apprentis-sorciers de mettre la pédale douce sur la course au libéralisme débridé. Mais ce n’est qu’une façade, une façon d’endormir le malade avant de lui administrer le remède qui va le tuer. Le gouvernement Valls ne fait pas autrement. Céder – provisoirement – sur UberPop, une application exploité par une filiale de Google valorisée à 3 mds de dollars, est plus simple que de faire plier Facebook qui pèse 215 mds$.

    Justement, Facebook soutient en ce moment avec la France un petit bras-de-fer. Convaincue d’accéder à l’ensemble des données de ses utilisateurs grâce à sa collaboration avec la NSA (National Security Agency), laquelle a, en 2013, recruté son responsable de la sécurité – mais ce n’est pas ça qui émeut nos américanophiles élites -, Facebook a fini par les agacer à force de prendre ses aises avec la vie privée de ses utilisateurs. Entre autres données, la société exploite, en notant leurs dates et heures, les fréquences et les durées d’activité sur le réseau, les coordonnées téléchargées depuis un autre appareil d’une autre marque, des données d’emplacement GPS, wifi, Bluetooth, les données d’achat et de transaction, et peut vous pister en utilisant les numéros de carte bleue. Etc. Transférées et stockées aux États-Unis, toutes les informations récoltées sur Facebook mais aussi What’sApp ou Instagram, alimentent un lucratif marché de données.

    Mais on pourrait croire que c’est à l’insu de notre plein gré. Pas du tout ! Tout ça est parfaitement légal grâce à un accord signé entre l’UE et les multinationales américaines, le traité transatlantique dit Safe Harbor qui permet en réalité de contourner la Directive 95/46/CE sur la protection des données personnelles en vigueur en Europe depuis 1998. Face aux dérives, dont le scandale de l’affaire Prism[2] a révélé l’ampleur en 2013, l’UE tente de revenir sur cet accord. Mais les multinationales concernées se rebiffent et promettent de multiplier les procédures en Justice contre les états. Les Européens désargentés face aux milliards des multinationales de l’internet dont les suppôts siègent au sein de l’UE elle-même : on voit d’ici le tableau. Mais, ça ne vous rappelle rien ?

    Le TAFTA sera l’aboutissement et le point d’orgue d’une entreprise de satellisation de l’europe entamée depuis bientôt vingt ans. Et si toutes les élites européennes ne sont pas enthousistes, les françaises, elles, sont par leur idéologie, leur histoire et leur formation, tendues vers cela. Rappelez-vous, la French american foundation et son programme Young leaders, dont les adeptes gouvernent et vont, de plus en plus, gouverner la France. Leur dernier rejeton (2012) vient de rejoindre le gouvernement Valls : il s’appelle Emmanuel Macron.

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[1] Ce matin, le Premier ministre Valls a déclaré que la loi Thévenoud sera appliquée et qu’UberPop sera interdit au 1er janvier 2015. La société UBER, qui a déposé des recours, a annoncé que le service continuerait.

[2] Le programme de surveillance électronique de la NSA, révélé par Edward Snowden

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Une réponse à Big Brother is watching you !

  1. Robert dit :

    L’impérialisme américain dans toute sa splendeur, qui ne prend même plus la peine d’ avancer masqué. Les US sont d’autant plus attentifs à une main-mise sur l’ Europe que mes BRICS tentent de s’ affirmer dans le reste du monde.

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