Décryptage (2).

Interdiction du bisphénol A : la meilleure nouvelle de l’année 2014.

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    Il est vrai que 2014 a été avare de bonnes nouvelles. Pourtant, à première vue, cette proposition peut sembler tirée par les cheveux. A l’examen, elle n’est pas loin de la vérité.

    Connu depuis son invention en 1928 par un scientifique russe comme un perturbateur endocrinien, le bisphénol A est, depuis qu’il y a cinquante ans on a découvert ses vertus en la matière, utilisé dans l’industrie alimentaire pour étanchéifier les contenants non seulement en plastique mais aussi en fer (boîtes de conserve, canettes). Les effets de sa nocivité se sont alors vu multiplier à l’infini. Car le bisphénol A est soupçonné depuis longtemps d’être à l’origine de maux divers et variés à la fois pour l’Homme (la toxicité) et l’environnement (l’écotoxicité). A telle enseigne que le Canada en a, le premier, interdit l’usage dans les biberons en 2008. Il fut imité en 2010 par la France, puis l’UE en interdit la fabrication – mais pas la commercialisation – en 2011. On ne s’étonnera pas que l’industrie agro-alimentaire ait mis le paquet pour en empêcher l’interdiction définitive. Celle qui vient d’entrer en vigueur ce 1er janvier en France a été votée en… 2012 ! Et les stocks continueront d’être écoulés. Mais le citoyen-consommateur peut s’y opposer en privilégiant les produits n’en contenant pas.

   C’est la meilleur nouvelle de l’année 20114, je le répète, car ses effets sur la santé, avérés par des expériences animales que les autorités sanitaires françaises ont toujours réussi à retarder sur l’Homme, sont innombrables et, surtout, universelles. Jugez plutôt ![1]

    Effets connus : le BPA est un « leurre hormonal », capable de mimer l’effet des hormones sexuelles féminines, qui jouent un rôle dans la fonction de reproduction mais aussi dans le développement d’organes comme le cerveau ou le système cardiovasculaire. Le bisphénol A se trouve maintenant dans presque tous les organismes vivants. Présent sous forme libre dans un grand nombre de reçus de caisse (papier thermique), il pénètre l’organisme humain par la peau. Son ingestion régulière et répétée, même à faible dose, induit des risques plus élevés de diabète sucré, de maladies cardiovasculaires, d’altération des fonctions hépatiques, de résistance aux chimiothérapies chez les patients cancéreux, d’altération de l’émail dentaire, etc.

    Des expériences ont montré l’effet du BPA sur l’appareil reproducteur des sujets. Chez le lapin (l’animal ; on ne sait pas si c’est valable pour le chaud-lapin), le bisphénol A peut inhiber l’érection du pénis à la suite de modifications des tissus du corps caverneux par augmentation de collagène fibreux, dépôts de graisse, hyperplasie et fibrose ; la souris de laboratoire exposée in utero à de faibles doses de BPA présente plus de risques de fausses couches et de prématurité ; elle accouche de mâles présentant une prostate plus lourde et un épididyme diminué, alors que les femelles présenteront des altérations du développement des glandes mammaires ; etc.

    Plusieurs impacts sont avérés chez l’animal en exposition prénatale net post-natale : effets sur le système reproducteur mâle et femelle, augmentation de kyste des ovaires, puberté avancée. Chez l’animal adulte, des effets sont observés sur le cerveau et le comportement.. Ils ne peuvent être démontrés chez l’être humain faute de données, mais plusieurs études sur l’animal ont montré un effet sur le développement neurologique en cas d’exposition in utero ou périnatale ; des effets sur le métabolisme lipidique, glucidique et le système cardiovasculaire suspectés chez l’Homme à la suite d’une étude transversale  qui a mis en évidence une corrélation entre ces risques et la teneur urinaire en BPA. L’exposition in utero ou chez l’adulte de rongeurs au BPA affecte le métabolisme du foie, des tissus adipeux et du pancréas, la lipogenèse (synthèse des lipides et des corps gras par l’organisme), le métabolisme des glucides. Le BPA augmente de manière avérée la lipémie (stockage de graisses) et le risque de surcharge pondérale. Il présente également des effets thyroïdiens, des effets sur le système immunitaire, sur le sein, l’intestin, la prostate (développement et cancer).

    Massivement produit et dispersé dans l’environnement depuis quelques décennies, il est couramment retrouvé dans l’organisme d’une large majorité de la population, quel que soit l’âge, et notamment chez les enfants, mais aussi la faune de nos rivières. Car cette substance, comme beaucoup d’autres utilisées dans les industries alimentaire et pharmaceutique, ne sont pas biodégradables ou, en tout cas, ne le sont pas à l’échelle d’une génération. N’en jetez plus !

    Au lecteur sceptique étonné de cette focale sur une information apparemment banale, je dis qu’elle est au contraire essentielle. Et j’utilise ce mot à dessein. Cette information touche en effet à tout ce qui est la problématique de notre temps et nous concerne au plus haut point à la fois comme individus, comme citoyens, comme membres de l’espèce humaine et, même, comme créatures dotées de conscience. Cet article n’est qu’une alerte : aussi ne m’étendrai-je pas sur le sujet. Il me suffit juste de dire que l’interdiction du bisphénol A intéresse la santé, la nôtre et celle des créatures avec lesquelles nous partageons cette bonne Terre et ses ressources. Elle intéresse nos finances : 2,8 millions de Français atteints de troubles cardiovasculaires en affection de longue durée coûtaient 18,7 Mds€ à la Sécu, c’est-à-dire nous, en 2012. C’est la deuxième cause de mortalité avec 147 000 décès par an contre 150 000 au cancer, lequel coûte 17 Mds€. Quant à l’obésité, dont il est remarquable qu’en France elle ait doublé en quinze ans, son coût direct est d’ores-et-déjà estimé à 7,5 mds€ chaque année, ce, nonobstant ses effets catastrophique sur le bien-être de ceux qu’elle frappe, les jeunes, notamment.

    La fin du bisphénol A intéresse notre modèle économique : elle contribue à réorienter notre alimentation vers un modèle plus sain en privant les industries chimiques et agro-alimentaires d’un des deux outils qui leur permettent d’inonder le marché de produits transformés gavés de saloperies (sel, sucre, exhausteurs de goût et, surtout, de faim, etc.) : l’isolant et le conservateur chimique. Des ingrédients grâce auxquels l’agriculture est en réalité devenue un simple débouché pour l’industrie chimique et les activités de transport, et un prétexte pour écouler des contenants et des additifs que ni l’organisme humain ni l’environnement ne savent éliminer.[2] Ce, dans des quantités astronomiques hors de proportion avec nos besoins : 30% de ce que nous achetons se retrouve dans les décharges. Et, à eux seuls, les déchets alimentaires des Européens suffiraient à nourrir tous les affamés d’Afrique.

    Ceci ne vous rappelle rien ? Ce modèle est celui que le Traité transatlantique essaie de nous vendre…

    Encore un mot. L’organisme humain, l’organisme animal et l’organisme écologique ne savent pas éliminer ce genre de produit. Cette vérité m’a été illustrée récemment par une anecdote qu’on m’a racontée et qui fait froid dans le dos. Depuis quelques années, à cause de la multiplication des inondations dans le midi de la France, des cimetières entiers ont été déménagés par les Communes sinistrées. Que croyez-vous qu’on y a trouvé ? Des cadavres de personnes mortes depuis deux ans et encore parfaitement intacts, conservés par les multiples substances en E qu’on leur a fait ingurgiter depuis quarante ans…

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[1] Les exemples sont tirés de l’article bisphénol A de Wikipédia. Mon seul mérite est d’avoir lu les documents de référence et d’autres que j’avais consultés en 2012 pour les besoins de mon livre La France confisquée.

[2] Une étude canadienne a démontré que le Saint-Laurent charrie en permanences du BPA, entre autres saloperies comme des composants de la pilule contraceptive. Autant de perturbateurs endocriniens qui mettent la pagaille dans la reproduction des poissons et qu’on retrouve ensuite dans nos assiettes et… dans nos cadavres !

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Une réponse à Décryptage (2).

  1. jany dit :

    Très intéressant, il était temps ! Mais il me semble que l’interdiction au Canada remonte au début des années 2000 ou c’était l’alerte au Bisphénol A. Je l’avais vu dans une émission il y a 5 ans de cela, mais peut-être que je me trompe. En attendant c’est enfin une bonne chose !
    Amicalement

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