Rallye des Camps 16, 17 août : Courbons-Orange par le Mont Ventoux.

De Courbons à Orange par le Mont Ventoux.

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    Malgré la distance et la difficulté, l’étape du 15 août entre Cantaron et Courbons avait été effectuée dans l’euphorie car je savais que, le lendemain serait une journée tranquille. Le vendredi 16 fut comme un dimanche normal : repas en famille et promenade sur les hauteurs, juste au-dessus de la maison de Bernard (photo) et Francine, à plus de mille deux-cents mètres. C’est la première vraie journée de repos depuis mon départ le 1er août. En fin d’après-midi, tandis que Francine et Bernard étaient au jardin, je m’efforçai de regagner un peu de mon retard en relatant sur mon blog les deux étapes de Largentière et de Roybon. Le soir, après un repas commencé sur la terrasse et fini dans la cuisine, Francine insista pour, le lendemain, me faire recevoir à Orange par son frère Alain. Je me couchai contrarié par ce que mon téléphone m’avait de nouveau lâché Mais le sommeil vint vite.

    L’étape de Courbons à Orange commençait par un transfert auto jusqu’aux environs de Sisteron. Préoccupé par la défaillance de mon téléphone, je décidai de faire un crochet par la petite ville dans l’espoir d’y trouver un secours. Par chance, la boutique Orange était ouverte, non pas encore au public, mais une jeune femme y faisait le ménage. Un jeune homme arriva pendant que j’en attendais l’ouverture. Je lui expliquai en peu de mots de quoi il retournait et, lui, très serviable, me prit le téléphone des mains et se mit à le démonter. Il le brancha sur un appareil, le trifouilla tant et si bien qu’il me le rendit dix minutes plus tard en disant : « Voilà ! » J’eus l’impression d’avoir gagné au loto. Je voulus absolument le payer. Il refusa tout net et je m’en retournai, avec Bernard qui m’avait rejoint, vers la voiture où Francine nous attendait.

    Evidemment, Francine, qui conduisait, voulut absolument me faire gagner quelques kilomètres. il fallut presque que je me fâche pour qu’elle accepte de me laisser pas trop loin de l’endroit prévu. C’est finalement pour une étape de cent-trente kilomètres au lieu de cent-trente-huit que je me lançai après des adieux pleins d’effusions.

    La perspective de bisser le Ventoux en passant par Sault me faisait littéralement jubiler. En même temps, je n’étais pas très inquiet car je prenais au premier degré les commentaires lus ici et là, sur les trois faces de l’ascension. Je pensais que, des trois, la Sud, par Bédoin, était la plus difficile, avec ses mille six-cents mètres de dénivelé sur dix-huit kilomètres. Ne l’ayant pas encore faite, je ne conclurai pas sur ce point. Mais je le crois d’autant plus volontiers que j’ai été impressionné par sa descente, le 11 août, après avoir gravi la face Ouest, par Malaucène. La face Sud-Est, par Sault, est, selon Wikipédia, « la plus longue mais la plus facile des ascensions, avec 26 kilomètres, 1 220 mètres de dénivelé et des pentes à 5 %. » Alors, là, je m’insurge ! « La moins difficile » me paraît mieux convenir car, dit comme ça, on s’attend à une promenade. Et on déchante. Surtout si, à cause de la chaleur, qui fut de nouveau au rendez-vous, on a eu l’imprudence, à Sault, de s’arrêter à une terrasse et, au lieu de l’unique verre autorisé, de siffler deux demis d’une excellente bière alsacienne inconnue de moi et dont je ne me rappelle pas la marque. Du coup, le raidillon par lequel on quitte le village ne laisse pas de surprendre et on est tout content, lorsqu’on en est venu à bout, de s’élancer sur une route étroite mais merveilleusement confortable, qui serpente en pente de plus en plus forte au milieu des pins.

    Quoi qu’il en soit, à partir du chalet Reynard, c’est vraiment, sur six kilomètres, l’enfer. En particulier, les deux derniers kilomètres, vous n’êtes pas loin de croire au Diable. Bref, la réputation de cette ascension n’est pas usurpée, surtout pour un footeux qui s’est mis tard au vélo pour compenser le manque dû à l’impossibilité de continuer à fouler les pelouses pour cause d’arthrose. A deux kilomètres du sommet, je dépassai un cycliste, dont j’estimai instantanément le poids à près d’un quintal et demi, qui moulinait sans discontinuer pour faire avancer un vélo antédiluvien chargé de tous côtés de pas moins de quatre énormes sacoches et qui devait bien peser ses trente kilos. Je lui lançai un encouragement. Mais il n’avait pas l’air d’en avoir besoin. Quelques centaines de mètres plus haut, mon téléphone sonna. Quoique maudissant mon correspondant, je m’arrêtai pour répondre. Comme de juste, l’appel n’avait pas la moindre importance. Le gros cycliste en profita pour me dépasser en me jetant un « La panne ? »  avec un ton qui me parut moqueur.  Le temps que je réponde à mon importun interlocuteur, il avait pris quelques centaines de mètres d’avance que j’entrepris illico de rattraper malgré l’épuisement. « Quel esprit de compétition ! », pensez-vous. En fait, ce n’est pas du tout ça. Surtout quand on roule sur un vélo de sept kilos contre un quatre fois plus lourd. En réalité, ce petit jeu servait à distraire mon esprit et à le détourner d’une tentation, réelle, de mettre pied à terre. Et ça marche ! Lorsque je dépassai de nouveau mon concurrent et compagnon de souffrance, il ne leva même pas la tête pour répondre à un dernier encouragement.

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    Le dernier kilomètre d’ascension fut effectué dans un début de brouillard. Il me sembla que, sitôt arrivé au sommet, toute fatigue m’avait quitté. La photo sous le panneau « Sommet Mont Ventoux – 1 911 m » et la discussion avec des touristes surtout admiratifs du vélo étaient déjà un rituel ; une dame fit des allusions en me parlant d’Armstrong avec un sourire. Cette fois, je m’attardai. J’achetai des bonbons au miel qui vinrent alourdir mon bagage. Puis j’enfilai, avec l’aide de la touriste soupçonneuse qui, ainsi, se rachetait un peu, un coupe-vent que ma nounou Francine avait glissé dans mon sac et j’entamai la descente dans une humidité glacée. (A suivre)

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