La confrontation n’a pas eu lieu
Le Docteur François Rémy et Ali Amrane à l’inauguration d’une semaine très réussie.
Il n’y a pas eu de confrontation. Apparemment, les duettistes Besnaci-Lancou-Manceron ont compris qu’il fallait faire profil bas. L’incident provoqué la veille par l’exaspération de Fatima pendant la conférence du Docteur Rémy a peut-être fait réfléchir les organisateurs. Toujours est-il que, dans l’ensemble, la propagande flniste des deux têtes de la Ligue des Droits de l’Homme de Toulon a été très timide. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne s’est rien passé. Tout, dans le discours de Gilles Manceron, avait pour seuls buts de culpabiliser la France et d’excuser ses amis fellaghas.
Le ton était donné par le film produit par la Licra « Harkis, histoire d’un abandon ». L’Histoire de l’Algérie revue et corrigée par le lobby tiers-mondiste et cosmopolitiste et servie par un « historien » à peine sorti de l’école qui joue sur les détails et les oublis ou les occultations pour, sans le dire, fustiger la France. Car, en vérité, son combat est et reste la repentance. Quoique haïs, les Harkis sont, de ce point de vue, un excellent vecteur. Dire, par exemple, que les Musulmans d’Algérie n’ont eu le droit de vote « qu’en 1947 » et qu’ils votaient dans un collège différent de celui des Européens, c’est omettre que le long cheminement de l’Algérie vers l’intégration, finalement interrompu par l’indépendance, c’est fait contre les obstacles idéologiques, communautaristes et religieux. Le plus important d’entre eux est que la Troisième République maçonnique et laïque exigeait que les Musulmans désirant être faits français renoncent à ce qu’on appelait le « statut personnel », autrement dit, à l’allégeance prioritaire à l’Islam. Ce que les très puissants et influents Oulémas algériens, pour qui il n’y avait pas des Français et des Algériens mais des Roumis (Chrétiens) et des Musulmans, n’ont jamais voulu admettre. Les Musulmans qui passaient outre étaient ostracisés et montrés du doigt. D’autre part, expliquer que les Européens d’Algérie avaient un niveau de vie beaucoup plus élevé que les fellahs musulmans, en suggérant qu’ils le devaient à leur seule « européanité », en oubliant qu’il y avait aussi des familles musulmanes richissimes, c’est suggérer que la France organisait l’apartheid et l’exploitation des uns par les autres.
S’agissant des Harkis, le film n’a pas échappé à la tentation de minimiser le nombre des victimes des massacres de 1962 : 75 000 au lieu des 150 000 minimum admis officiellement dans un document officiel que j’ai en ma possession et qui fait suite au recensement opéré jadis par le Commandant François. C’est quand même mieux que les 25 000 de l’indécent ami de Fatima et Gilles, le dénommé Benjamin Stora. Mais là n’est pas l’essentiel. C’est le parti-pris victimiste et misérabiliste qui transpire à chaque image, chaque commentaire. Quelques exemples : les Harkis sont l’émanation de l’Armée française, laquelle en aurait même armé certains malgré eux. Faux : les groupes d’auto-défense sont un phénomène spontané puis généralisé quand les combats se sont intensifiés à partir de 1956. Des Harkis le sont devenus parce que la solde était un moyen de gagner de l’argent : c’est vrai mais le dire aussi sèchement suggère la vénalité alors qu’il s’agissait juste pour certains fellahs de pallier l’impossibilité de cultiver leurs terres sans faire allégeance aux fellaghas. Pourquoi choisir d’être harki plutôt que d’acheter sa tranquillité en cotisant au FLN ne serait pas un choix, c’est-à-dire un acte politique ? Au total, plus de 400 000 hommes et quelques milliers de femmes ont servi dans les forces supplétives : n’est-ce pas un signe d’engagement des Musulmans contre le FLN et, donc, contre l’indépendance ? Etc.
Quant au discours des conférenciers, je ne parlerai pas de Fatima Besnaci-Lancou, dont le propos sans cesse narcissique n’a aucun intérêt, mais de Gilles Manceron, qui fut fidèle à la tradition de la rhétorique stalinienne qui consiste à suggérer des conclusions lourdes à partir d’un discours apparemment anodin. Une fois posé le présupposé apartheid[1] aux dépens des Musulmans, dont il attribue la responsabilité aux Européens, il suggère que ceux-ci étaient des racistes. Contextualiser, pour lui, ça consiste à suggérer que les massacres du 5 juillet et les enlèvements de Piénoirs ont été commis en réaction aux attentats de l’OAS. A propos des tortures pratiquées après le 19 mars sur les anciens Harkis, il relève qu’elles l’ont été, souvent, là où l’Armée française avait elle-même torturé. Il s’empresse d’ajouter « ce n’est pas pour excuser les Algériens » mais c’est pourtant bien ce qu’il suggère. Et tout à l’avenant. Tout dans son discours consistait, comme en un entonnoir, à faire porter la responsabilité des injustices subies par les Harkis sur les Piénoirs, allant même jusqu’à leur reprocher de ne pas avoir empêché leur relégation dans des camps. Par là, il oubliait que sa Ligue des Droits de l’Homme n’en avait pas fait plus. Jamais, par exemple, il n’a prononcé le nom de De Gaulle. Erreur funeste car, du coup, les PN présents dans la salle ne lui ont rien passé.
En définitive, cette conférence dédiée aux Harkis fut, du fait de la volonté du conférencier de faire peser la responsabilité de leur sort su l’attitude des Pieds-Noirs, confisquée par eux. Juste retour des choses, puisque, la veille, c’est FBL qui avait imposé la problématique harkie dans une conférence consacrée aux traumatismes. (Lire) Du coup, le thème de la semaine, « Mémoires croisées », fut parfaitement respecté.
Ainsi, et ce fut la surprise de cette conférence, bonne pour nous, mauvaise pour Manceron et sa clique, c’est le public qui lui a, fort civilement mais très fermement, cloué le bec. Ce fut, en vrac : une intervention magistrale, pour le coup, du Principal piénoir du collège de Grasse ; un témoignage très émouvant de Simone Gautier montrant à quel point les Européens et les Musulmans pouvaient être liés ; une intervention formidablement structurée de Jacqueline Pérez qui obligea Manceron à s’expliquer piteusement sur le parallèle artificiel et parfaitement scandaleux qu’il avait opéré entre torture par l’Armée française et massacres de civils et d’enfants par les fellaghas après le cessez-le-feu ; une autre d’Eveline Caduc sur la pétition pour la reconnaissance des massacres du 5 juillet d’Oran[2] que Manceron et ses amis s’efforcent de contrecarrer en mobilisant tous leurs complices de la sphère politico-médiatique (lire) ; une autre encore de Madame Manzano, co-organisatrice de cette semaine de Grasse en qualité de Vice-Présidente de l’ANFANOMA, qui lui valut, sans aucun égard pour son âge, une remarque désobligeante et déplacée de Fatima Besnaci-Lancou.
Au total, et contrairement à ce que je pronostiquais dans mon précédent post, il y eut bel et bien débat et non propagande. La salle attendait que je m’exprime mais chacune des interventions ayant atteint sa cible, je n’eus pas à le faire. Pour énerver un peu nos amis porteurs de valises, je demandai néanmoins la parole. Je voulais juste illustrer un propos d’Ali Amrane vantant la réussite de certains enfants de Harkis en citant des personnalités connues du grand public comme Kamel Ouali, Chimène Badi et …Smaïn. Ayant perdu son père fellagha, celui-ci a été élevé et adopté par un couple de Harkis auquel il voue un véritable culte. Il existe même un fils de Harki premier danseur de l’Opéra de Paris. Mais je n’eus pas droit au micro. Je n’en fus pas dérangé car les interventions de nos amis se succédaient comme des solos d’un orchestre parfaitement accordé. Au point que FBL et Manceron ont pu se demander si la riposte n’avait pas été concertée. Qui sait ?