Ce mardi aurait pu être consacré aux deux élections importantes de dimanche, l’européenne et l’ukrainienne. C’est finalement Bygmalion qui fait le buzz.
Bygmalion : la tirelire.
Honnêtement, jamais je n’ai pensé que l’affaire Bygmalion exploserait au grand jour de cette façon. Nous étions tellement habitués à ce que les affaires traînent longtemps avant que la Justice s’en empare sérieusement qu’on reste sidéré par les développements d’aujourd’hui. Il est vrai que Jean-François Copé, le principal personnage de cette affaire, a lui-même allumé la mèche. En tentant, dès vendredi dernier, de se démarquer de ses amis de Bygmalion, il leur a fait comprendre qu’il n’hésiterait pas à les lâcher dans la tempête.
Réplique immédiate : l’avocat de la société est venu lui-même devant les caméras expliquer que son client avait été contraint de produire pour 11 millions d’€uros de fausses factures à l’UMP pour des prestations effectuées au bénéfice de la campagne de Nicolas Sarkozy sous peine de ne pas être payé. On n’est plus dans une simple affaire de financement occulte de campagne électorale mais dans une pratique mafieuse qui s’apparente à du chantage, voire du racket. Il y a dans cette affaire un fort relent de rétrocommission. (Lire Copé ou la kleptocratie triomphante)
A propos de rétrocommission, Bygmalion (pour mieux la connaître, lire), qui a bénéficié de manière abusive de commandes discrétionnaires de Patrick de Carolis alors qu’il était président de France-Télévisions (affaire entre les mains de la Justice) lui aurait reversé 100 000 €uros. Combien lui-même a-t-il versé à ses successeurs pour obtenir, une fois parti de France-Télévisions, pour plusieurs millions d’€uros de commandes sans appel d’offre chaque année ? J’ai dans l’idée qu’on le saura très bientôt.
Quelques heures plus tard, sur BFM-TV, Jérôme Lavrilleux, l’ex-responsable de la campagne de Nicolas Sarkozy de 2012 confirmait et précisait que, s’étant rendu compte des proportions prises par l’opération, il s’en était ouvert à plusieurs personnalités de l’UMP. Plusieurs personnalités de l’UMP mais pas Nicolas Sarkozy, ni Jean-François Copé, les deux personnages les plus concernés. On ne peut mieux dire que Lavrilleux est sacrifié pour protéger ses chefs. Curieusement, Ruth Elkrief, qui l’interrogeait, ne lui a pas demandé de dire qui savait. De là à penser que tout le monde savait…
Jérôme Lavrilleux très abattu sur BFM-TV
Pour mémoire, il s’agit d’argent public. 26,7 millions d’€uros ont été versés par l’UMP à la filiale de Bygmalion, Event et Cie en deux ans, dont, selon le Point qui cite une certaine société Leni, détenue par Audacia dont Charles Beigbeder est l’actionnaire de référence, une partie a atterri dans la poche d’amis de Copé. Ce n’est qu’une partie des 480 m€ pris aux contribuables (132 m€ en Allemagne) pour financer le très grand train de vie des partis politiques français Une chose est sûre, comme je viens de l’entendre de la bouche de Laurent Joffrin sur BFM TV, demain, il y aura un mort à l’UMP. « Au sens figuré… », s’empresse-t-il d’ajouter. Je n’en suis pas si sûr, tant Jérôme Lavrilleux, le sacrifié, m’a paru atteint par cette affaire. Pour tout dire, il m’a fait penser à Pierre Bérégovoy, abandonné de tous, à la veille de se libérer pour toujours de l’affaire du prêt sans intérêt que lui avait fait Roger-Patrice Pelat, le sulfureux ami de François Mitterrand.
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La Russie reconnaît formellement le nouveau président élu d’Ukraine.
Aussitôt élu dimanche 25 mai avec près de 54% de voix, le milliardaire Petro Porochenko a déclaré qu’il ne laisserait pas l’Est de l’Ukraine devenir une nouvelle Somalie et qu’il ne reconnaîtrait pas l’annexion de la Crimée. Dans le même temps, il a souhaité renouer des relations de confiance avec la Russie où il pourrait se rendre dès la première quinzaine de Juin. Celle-ci, par la bouche du chef de sa diplomatie, s’est dite prête à un « dialogue constructif », confirmant ainsi la déclaration de vendredi dernier de Vladimir Poutine selon laquelle son pays reconnaîtrait le nouveau président élu d’Ukraine. Quant à lui, Viktor Ianoukovitch, le président déchu, a aussitôt indiqué qu’il respectait le choix des Ukrainiens. Que demander aux peuples ?
Ainsi, la crise ukrainienne, imputée par les Européistes au seul Vladimir Poutine, paraît être entrée dans une phase de règlement pacifique, nonobstant le combat d’arrière-garde des activistes de l’Est. Ce, avec la bénédiction dudit Poutine. Curieusement, nos chers médias ne se sont pas beaucoup attardés sur cette affaire autrement plus importante que les magouilles des Sarko-boys.
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Quelques perles sur le scrutin de dimanche.
*Les listes FN ont obtenu 25% des suffrages aux Européennes de dimanche. « Cela signifie que 75% des Français ont dit oui à l’Europe ! » Roland Cayrol, sondagiste, Directeur du Centre d’études politiques de Sciences-Po (ex-CEVIPOF)
*Dans le même genre, de Jean-Marie Le Guen. « Il faut relativiser. Les électeurs du FN ne représentent qu’un Français sur vingt ! » Problème de niveau Cm1 (de mon époque) : « sachant que les listes FN ont obtenu les suffrages de 4 711 339 des 46 555 253 électeurs inscrits, quelle est la part des français qui on voté pour lui ? Arrondir à l’unité supérieure) » Réponse : 1 sur 9. M. Le Guen, vous me ferez cent lignes ! Remarque : Le Guen, c’est l’hôpital qui se fout de la charité ; à cette aune, 1 Français sur 17 a voté pour les listes socialistes.
*Léa Salamé, sur I Télé pose cette question : « On a voulu la transparence. L’affaire Bygmalion n’est-elle pas la conséquence de la loi sur le financement des partis politiques ? » Un intervenant lui a sobrement répondu « La morale ! Un homme politique qui transgresse la loi doit être éjecté ! » Un autre a parlé d’incorruptibilité des politiques. Il m’a semblé qu’elle n’avait pas bien compris.