Alors que la blogosphère africaine bruisse de rumeurs selon lesquelles les Américains masseraient des forces en Espagne pour prévenir une déstabilisation de l’Algérie – rumeurs que, fort heureusement, aucun média sérieux n’a reprises – l’Histoire s’écrit en réalité au Val-de-Grâce. Remarque préalable : je n’ai encore lu aucun éditorial sur la signification géopolitique des soins donnés à Bouteflika par la médecine française. On ne parle que d’argent. « Qui va payer ? », se demande-t-on en rappelant que l’Algérie doit 25 millions d’€uros à la Sécu française, une somme parfaitement dérisoire comparée à ce que l’Algérie rapporte à la France. La réponse est simple : l’Algérie, évidemment, n’en déplaise aux binationaux tous fiérots de l’indépendance chèrement acquise, selon ce que leur enseigne la mythologie FLNiste servie par ses relais et ses soutiens tiers-mondiste porteurs de valises. L’Algérie paye, et le prix fort.
Les Accords d’Evian signés ce 19 mars 1962 de funeste mémoire pour les Pieds-Noirs, les Harkis et tous les patriotes français sont, de ce point de vue, parfaitement respectés. Non seulement la France profite très largement – et ce n’est que justice – des bénéfices du pétrole et du gaz qu’Elf puis Total extraient des puits du Sahara et gèrent de manière particulièrement opaque depuis 1956 mais, de plus, l’Algérie est un des rares pays au monde avec lesquels notre pays enregistre une balance commerciale positive de plus d’1 Md (1,4 Md€ en 2011[1]) et le sixième en ordre de grandeur, mais, surtout, le premier, et de loin, avec des économies équivalentes. De plus, la structure des échanges est également intéressante ; c’est le seul avec lequel notre excédent résulte de la vente de biens de consommation et non d’équipement. Enfin, une grosse part de cet excédent concerne notre agriculture. A croire, comme l’opposition algérienne le dénonce, d’ailleurs, que ce type d’échanges est surtout destiné à servir les intérêts français.
Ainsi, la France a tout lieu d’être satisfaite du gouvernement algérien qui déploie des trésors d’ingéniosité pour maintenir son pays dans le sous-développement alors que sa réserve en devises est estimée à 150 Mds€, en augmentation constante de 20 Mds€ chaque année, soit, par tête, 3 fois plus que la Chine dont on nous rebat pourtant les oreilles. Alors, quoi de plus logique que le président Bouteflika soit soigné à Paris, surtout quand on sait par ailleurs qu’il a la double nationalité, comme toutes les « élites » politico-intellectuelle algériennes ?[2]
S’il ne s’agissait que de cela, ce serait une bien piètre contrepartie. Les visas en sont une autre bien plus conséquente et néfaste à notre pays gangrené par le chômage. Des visas appelés à une augmentation exponentielle car les Socialistes, qui ont une sympathie naturelle pour les FLNistes, y sont de plus contraints par la nécessité de renouveler leur électorat.[3] Enfin, mais il faut suivre de près d’autres organes de presse que les média français pour le savoir, l’Algérie est un des principaux pourvoyeurs de moyens pour nos partis politiques avides de pouvoir et d’enrichissement pour leurs dirigeants.
Tout ceci, ajouté au fait que l’Histoire a ménagé entre les élites des deux rives de la Méditerranée des secrets explosifs, notamment à propos des crimes commis au nom de la décolonisation contre les Pieds-Noirs et les Harkis avec la complicité du gouvernement français, autrement dit, au fait que tout le monde se tient par la barbichette, il me semble qu’il était tout naturel que Boutef soit soigné en France. Pas seulement parce que nos médecins sont les meilleurs du monde, paraît-il, mais aussi, et surtout, parce que sa succession ne saurait se faire sans une concertation très intime des autorités françaises et algériennes, et une actualisation du pacte diabolique qui les lie.
[1] Selon la Direction générale du Trésor, les chiffres de 2012, non confirmés par l’INSEE, seraient de 6,4 Mds€ pour les exportations et 3,9 Mds€ d’importations, soit un solde de 2,5 Mds€.
[2] Au fait ! Savez-vous où vivait Bouteflika au moment de son élection à la résidence en avril 1999 ? Je vous le donne en mille. En France, évidemment. Et il y était si bien qu’il fallut une campagne de presse en Algérie pour qu’il se décide à quitter son confortable castel français acquis, sans doute, avec une partie des 60 millions de Francs (de 1981, soit 45 M€ d’aujourd’hui) qu’il avait piqués dans les caisses lorsqu’il était ministre des Affaires étrangères et emporté dans son exil en Suisse.
[3] On se souvient du rapport de Terra Nova, le think tank socialo-strausskahnien conseillant d’abandonner l’électorat populaire au profit de celui de l’Immigration. D’où la loi Valls ramenant le délai de naturalisation des Immigrés de cinq à trois ans. Notons qu’une interprétation parfaitement fantaisiste et laxiste du droit au regroupement familial permet à des Algériens retraités de venir s’installer en France sous prétexte que leurs enfants et petits-enfants y sont, et de recevoir dès qu’ils y ont mis les pieds une retraite de 850 € pour une personne seule et 1 150 € pour un couple, sans avoir jamais travaillé en France. Pour mémoire, 80% de nos agriculteurs touchent une retraie inférieure à 450 € et autant sont au RSA !