Numericable-SFR emprunte pour gaver Altice-Drahi

Patrick Drahi : la fuite en avant

5104257_web-tableau-chasse-drahi    Le Groupe Numéricâble-SFR vient d’annoncer qu’il va emprunter 1,6 mds€. Généralement, quand une entreprise emprunte, c’est pour investir. Dans le cas présent, non ! C’est pour verser 2,5 mds€ de dividendes à ses actionnaires. Donc, dira-t-on, Numericable a réalisé 900 millions de bénéfices après impôt… Là encore, non ! Elle a, au contraire – et pour la première fois de son existence – enregistré une perte. Et pas n’importe quelle perte : pas moins de 175 millions d’€uros. Alors, d’où viennent les 900 autres millions ? De la trésorerie de la société. Autrement dit, l’emprunt n’est pas destiné à l’investissement mais celui-ci est, de surcroît, mis en péril par l’opération.On savait que la boulimie d’achats de Drahi n’avait rien à voir avec un projet industriel mais tout d’une flibuste financière (on achète, on essore et on vide les caisses) ; de là à penser que ça se ferait si vite et avec si peu de scrupule et de discrétion.

    On assiste donc à une manœuvre à triple détente : 1. on verse des dividendes alors qu’on a fait une perte ; 2. pour ce faire, on emprunte les deux tiers de la somme ; 3. on prend le reste dans les caisses de l’entreprise. Interrogé, le président de Numericable n’a aucun scrupule à dire qu’il s’agit de « faire souffler Altice ». Donc, on fait payer à la filiale le confort de la maison-mère. Altice, propriété à 100% de Patrick Drahi, détient 78,5% de Numericable. Donc, Altice-Drahi va empocher 78,5% des dividendes soit près de 2 mds€. C’est beaucoup à la fois ; faisons une pause ! (Pause)

    Au fait, avez-vous entendu parler de cette affaire, dans nos médias ? Je ne parle même pas de la télé. Et encore moins de BFM-TV, propriété de Drahi et de ses associés Attali et Cukierman. Je parle de la presse écrite généraliste. Réponse (pour vous éviter des recherches) : 2. Dans l’Express-l’Expansion, hebdo-Drahi, on a droit, sous le titre : « Dividendes: pourquoi les entreprises s’endettent pour récompenser leurs actionnaires« , à un véritable plaidoyer pro-Drahi, sur le thème « Même les Américains, ils le font ![1] Même l’Etat ! Donc, pourquoi se priver ? » L’autre grand média à en avoir parlé, Libération, est resté très factuel et a même accrédité un probable mensonge, à savoir que le ratio d’endettement net du groupe restait inférieur à 4 fois le produit brut d’exploitation alors qu’il est, selon d’autres sources plus neutres, de 5,5. Mais Libé aussi est un produit Drahi. Le Figaro, le Point, le Monde, l’Obs, qui ont consacré quantité de textes aux péripéties de Drahi avec ses organes de presse, n’ont rien trouvé à dire sur l’emprunt. Cela s’appelle nombrilisme : les médias parlent des médias.

    Pour trouver des voix discordantes, à part le Canard enchaîné, évidemment, auquel je dois d’avoir été alerté, il faut aller dans la presse économique. Mais là aussi, c’est le plus souvent très factuel, quand ce n’est pas juste la publication du communiqué du groupe Altice. Tandis que Les Echos se montrent incroyablement dithyrambiques (lire et lire), Boursorama ose, sous le titre Numericable-SFR : au service d’Altice ? : « Ponctionner la fille pour éponger les dettes de la mère… ». Quant à laTribune.fr, concurrent des Echos réduit au numérique, elle cartonne. Si vous voulez tout savoir, c’est là qu’il faut aller (à part sur ce blog, évidemment !). Lisez Numericable-SFR va reverser 2,5 milliards d’euros à ses actionnaires et les autres articles consacrés au prédateur Drahi. Tout y est si ce n’est les raisons profondes qui font qu’il peut tout se permettre dont je vous parlerai plus loin.

    J’ai écris plus haut que BFM-TV n’en avait pas parlé. Faux ! Une certaine BFM-TV Trading Sat a écrit : « Numericable-SFR, filiale française du groupe de télécommunications Altice, annonce avoir levé avec succès deux nouvelles dettes à terme, une de 1.340 millions de dollars américains et une autre de 500 millions d’euros. » Et elle a sobrement ajouté : « Les produits résultant des prêts à terme, la trésorerie disponible et les disponibilités sur le crédit revolving de Numericable-SFR serviront à payer la distribution de prime aux actionnaires pour un total de 2,5 milliards d’euros ». Dans le même registre, l’article de Reuters-France n’est pas mal non plus. Ceux qui se demandent à quoi sert la presse boursière le sauront après l’avoir lu : enfumer les gogos qui spéculent en bourse.

    Pour mieux apprécier cet encouragement à acheter des actions Numericable, il faut savoir que l’ensemble de la place boursière est sur les dents et commence à s’inquiéter sérieusement ; début octobre, l’action a perdu sept points avant d’en reprendre deux. Surtout, l’agence Moody’s a dégradé Numericable-SFR de deux crans, de Ba3 à B1, la faisant ainsi passer en catégorie « très spéculative ». C’est un message aux pères de famille qui signifie « Toxique ! Tenez-vous à l’écart ! »

    Cela n’émeut pas la ministre du numérique, Axelle Lemaire et l’Autorité de la concurrence qui, elles, surveillent Drahi non pas parce qu’il magouille en bourse mais, suite à une plainte de son concurrent Bouygues Telecom, parce qu’il ne respecte pas ses promesses de déploiement de la fibre optique. Pourtant, le surendettement de ses entreprises coûtent de l’argent au contribuable puisque les intérêts – énormes dans ce cas – sont déduits de leurs bénéfices, ce qui les dispense d’impôt sur les sociétés. Encore, quand il s’agit d’endettement normal, c’est-à-dire en vue d’investir, on le comprend. Mais quand c’est pour verser des dividendes, dont 2 mds€ à quelqu’un qui ne paie pas ses propres impôts en France ? Car Drahi vit en Suisse, Altice est domiciliée à Guernesey et ses autres entreprises sont au Luxembourg ou aux Pays-Bas. Seule Numericable-SFR, qui ne paie pas d’impôts compte tenu de son endettement et de ses pertes, est « imposable » en France.

    Bref, Drahi fait ce qu’il veut, quand il veut. Les collusions (dont j’ai parlé naguère), les complicités, les complaisances et, surtout, le souci de l’intérêt bien compris de la multitude de profiteurs qui participent à ses opérations font que cet homme, que tout le monde présente comme un Franco-Israélien alors qu’il a renoncé à sa nationalité en crachant sur la France[2], se permet tout. Certes, des inquiétudes se font jour ici ou là mais, globalement, il a le champ libre. Pour quel objet ? Pour quelles raisons ? Qu’est-ce qui peut expliquer cette latitude qui lui est laissée de tout oser ? J’espère et je crois qu’on le saura très bientôt. Car la boulimie d’accumulation de Drahi ressemble de plus en plus à une fuite en avant.

    Rappelez-vous mon article du 15 avril 2014 où j’écrivais notamment : « […]la vente de SFR à Altice, une vente révélatrice des mœurs du temps et qui débouchera à plus ou moins brève échéance sur un scandale d’état… » Et je m’étonnais de la façon dont, au cours d’une audience hallucinante diffusée par LCP-Public Sénat, Arnaud Montebourg avait « vendu » à la commission des finances mixtes du Parlement l’acquisition de SFR par Numericable, alors qu’il s’y opposait encore quelques semaines auparavant. Le très moralisant Emmanuelli avait pris date en faisant mine de s’inquiéter des 19 milliards d’€uros d’endettement d’Altice (on en est à 45 mds€ !). Mais c’est passé comme une lettre à la Poste. Combien Montebourg et le PS ont-ils touché sous la table ? Et combien ont touché leurs adversaires « de droite » qui n’on pas moufté ?

    Eh ! bien, oui, le scandale d’état est pour bientôt. Je suis certain que le véritable projet de Patrick Drahi est de s’enrichir monstrueusement et très vite en arrosant largement autour de lui avant de filer à l’anglaise. Ou, plus sûrement, à l’israélienne. En effet, Israël n’extradant pas ses nationaux, ce pays est devenu un refuge, un havre pour les escrocs juifs… étrangers ! Car protecteur pour les Juifs exerçant ailleurs, c’est-à-dire, si on en croit Jacques Attali, des juifs qui spolient des goys, Israël ne l’est pas pour ceux de l’intérieur. Drahi, qui s’est taillé un bel empire dans les médias (je vous recommande cette excellente télévision d’information internationale qu’est i24news en langue française), y jouira sans entraves des milliards que notre lâcheté et le vice de nos élites décadentes lui auront permis d’amasser. Et plus rien ne pourra faire qu’il en soit autrement car il y a tant de gens mouillés avec lui que ce sera un soulagement pour eux que de le voir aller ne pas se faire pendre ailleurs.

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[1] A lire avec l’accent de Robert Castel.
[2] « La perte de la nationalité lui est définitivement acquise. Il ne s’agit pas d’une double nationalité franco-israélienne » D’après Challenges… qu’il vient de racheter !

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3 réponses à Numericable-SFR emprunte pour gaver Altice-Drahi

  1. macia dit :

    J’étais client SFR adsl çà allait , mais depuis le rachat et la fibre çà fonctionne moins bien. Pourquoi ? Manque de personnel qualifié ? Manque d’investissements d’hommes et de matériel ? Et je ne parle pas de RMC, on se croirait devant un stand de Foire du village à écouter ses grandes gueules : aucune classe ! Et on rabâche, et on rabâche…

  2. Robert dit :

    Encore un bel exemple de capitalisme financier prédateur… Tapie était finalement un précurseur, et bien d’autres ont fait bien pire que lui depuis…

  3. Jean-Pierre dit :

    Ce monsieur Patrick Drahi s’est livré 1 à l’abus de biens sociaux, 2 à la distribution de dividendes fictifs. Pour cela,il devrait être au moins en prison, ainsi que les membres du conseil administration pour complicité.
    Quels étaient les membres du conseil d’administration ?

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